Du corps à baleines au corset en Grande Bretagne au XVIIIe siècle

Le “corps à baleines”, comme le “corset”, avait pour fonction de sculpter le haut du corps, lui apportant une posture gainée et élégante : il relevait la poitrine, cintrait la taille, et maintenait les épaules basses grâce à des bretelles. Au cours du XVIIIe siècle, le “corps à baleines” connaît des évolutions, perdant progressivement en rigidité pour aboutir à la naissance du “corset”.

En Grande Bretagne, les corsets étaient portés même dans les circonstances peu formelles et quotidiennes. Ils sont distingués en trois catégories :

1 : « Stays » (ou « boned body »)

Il fut porté de la fin du XVIème siècle à la fin du XVIIIème siècle et maintenait une silhouette en cône inversé, une base solide sur laquelle étaient déversés les flots d’apparats de la robe.

Le terme « stays » vient probablement du français « étayer » (soutenir), car ce corset était en effet presque entièrement structuré de baleines et donc très rigide. Néanmoins, la découpe au niveau de la taille était ouverte, afin de relâcher la pression des baleines et apporter plus de confort.

Le XIIIème siècle est un moment charnière où le « corps baleiné » évolue et tend à perdre en rigidité : on voit alors apparaître des « corps semi-baleinés » (« half boned stays »), qui bientôt laisseront place aux « jumps » puis aux « corsets ».

2 : « Jumps »

Certains corsets appelés « jumps » (littéralement « rehausseurs ») étaient à l’origine portés par les travailleuses et ne comportaient que quelques baleines (environ quatre), voire aucune.

Les jumps étaient fermés à l’avant pour être faciles à mettre et à enlever seule. Au début du XVIIIème siècle ils étaient portés dans un cadre informel, mais durant les décennies suivantes on s’aperçut qu’ils offraient plus de confort que le « stays », et à la fin XVIIIème, leur popularité explosa chez les dames fortunées alors que la mode basculait au style moins recherché du néoclassique.

Les docteurs de l’époque encouragèrent également ce phénomène, en déconseillant de porter des corsets trop étriqués ; pourtant, un poème de 1762 nous montre qu’un code moral restait associé au port du corset : « Maintenant une forme soignée dans un stays, maintenant une souillon dans un jumps ».

3 : « Corset »

Ce modèle est né dans l’élan de popularité du « jumps », alors que les sous-vêtements féminins évoluaient pour devenir plus confortables.

Issu du français « corps », le terme de « corset » vit le jour à la fin du XVIIIème siècle. On trouve une description de 1777, où le corset est désigné comme « un petit stays fait de lin, sans baleines, que les dames serrent devant avec des cordelettes ou un ruban et qu’elles portent avec un déshabillé ». Le corset était en effet un habit à part entière, une tenue décontractée que l’on portait avec une simple robe de chambre orientale ou un peignoir passé dessus.

En Conclusion

La distinction entre ces trois types de corset n’est pas aisée, et on trouve nombre de modèles « transitionnels », qui sont plus ou moins structurés et rigides. Les paysannes, quant à elle, n’avaient bien souvent qu’un seul corset, possiblement en cuir, qu’elles ne lavaient jamais.

C’est un sujet qui fait débat. Soyons clair, les corsets en cuirs existaient au XVIIIe siècle, des pièces sont d’ailleurs conservées dans différents musées. Il apparaît toutefois que les corsets en cuir seraient des pièces de costume réservées à la très basse classe de travailleuses. Le corset en cuir servait probablement de soutien pour le dos pour des taches physiques difficiles.

Un pièce est conservée au musée de Killerton dans le Devon (sous la référence NT 1366631) mais n’est pas malheureusement pas visible pour le public.

Le musée de Nordiska (Stockholm – Suède) présente plusieurs pièces tout à fait représentatives des stays en cuir pouvant être porté à l’époque, en Grande Bretagne. En voici quelques photos.

Highland Dance, par David Allan, 1780
Highland Dance, par David Allan, 1780

Sources

Auteur de l’article : Emma Dardeau

  • BAUMGARTEN Linda – Eighteenth Century Clothing at Williamsburg. Williamsburg: Colonial Williamsburg. 1986.
  • BULCOCK J. – The Duties of a Lady’s Maid;: With Directions for Conduct, and Numberous Receipts for the Toilette. Google eBook. Retrieved 26/8/13
  • CUMMING Valerie & CUNNINGTON C.W. – Cunnington, P.E, The Dictionary of Fashion History (Rev., updated ed.). Oxford: Berg Publishers. 2010
  • DELANEY Mary – Autobiography and Correspondence of Mary Granville, Mrs Delany: With Interesting Reminiscences of King George the Third and Queen Charlotte. Cambridge: Cambridge University Press. 2011.
  • STEELE Valerie – The Corset: A Cultural History – Yale University Press: London. 2001.
  • STEELE Valerie (ed) – The Berg Companion to Fashion – Oxford: Berg Publishers. 2010
  • VINCENT Susan – The Anatomy of Fashion: Dressing the Body from the Renaissance to Today – Oxford: Berg Publishers. 2009
  • The Dreamstress – What’s the difference between stays, jumps & a corset – [page consultée en avril 2016]
  • Chloe A Whittaker – Undergarments, Stays and Side hoops – [page consultée en avril 2016]
  • Costume Historian – Leather stays – mid 18th century – [page consultée en aout 2017]
  • Isis Wardrobe – Leather stays in Sweden – [page consultée en aout 2017]